Télé de droite, radio de gauche
Du rififi dans le PAF ! Avec la plainte déposée, pour « dénigrement », par les présidentes de Radio-France et France-Télévisions, à l’encontre de Cnews, Europe1 et le JDD, le paysage audiovisuel français entre lui aussi en zones de turbulences. Alors que l’échéance présidentielle commence à se dessiner, cette procédure marque une nouvelle étape dans la dégradation des relations entre médias du privé et du public, après l’offensive lancée par ceux du groupe Bolloré en réponse à la disparition de C8, imposée par l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel français. Avec accélération à la suite de l’affaire Cohen-Legrand, journalistes de France-Télévisions et Libération, accusés de collusion avec le PS après une vidéo prise sur le vif.
Au départ, c’est donc l’affaire C8 qui a empoisonné l’atmosphère. Avec son trublion Cyrille Hanouna pour faire chauffer les plateaux télé, elle a vite été dans le collimateur de l’Arcom. Référencée sur le réseau de la TNT, elle a signé, comme ses concurrentes, une charte de bonne conduite sur laquelle Hanouna s’est magistralement assis. La vie privée et la lutte contre les discriminations n’étaient pas les obligations les plus respectées dans son émission. Les avertissements multiples puis de lourdes sanctions financières n’ont pas suffi et les dérapages (dont un d’anthologie avec le député LFI Louis Boyard) ont conduit à la fermeture de la fréquence, en février dernier. A la plus grande fureur du groupe Bolloré.
Mais la pression de l’Arcom ne s’est pas limitée à C8. La chaîne Cnews était également en ligne de mire pour son positionnement trop manifeste en faveur de la droite extrême. Des accusations devant lesquelles le groupe Bolloré ne s’est pas contenté d’une ligne de défense. Il est passé résolument à l’offensive en accusant à son tour l’Arcom de fermer les yeux devant « le positionnement à gauche » des radios publiques, France Inter et France Culture notamment, leur reprochant la couleur dominante de leurs invités et la tonalité des humoristes des matinales. Le tout avec de l’argent public.
Dans le rôle du procureur, Pascal Praud (photo) le journaliste-animateur vedette de Cnews a fait valoir son usage du vitriol en introduisant ses émissions matinales. De Macron à la ville de Nantes et de France Inter aux petits hommes gris de l’administration française, chacun en prend pour son grade. Avec un indéniable succès puisque le trident du groupe Bolloré (Cnews, Europe1, JDD) a enregistré une hausse de son audience alors que le dernier médiamétrie en date donne 500.000 auditeurs en mois à France Inter. Mais qui reste, de très loin, la première radio du pays.
Et voilà donc maintenant la plainte des deux Pdg du public contre ces trois médias, accusés de dénigrer les confrères du public. Une procédure peu habituelle puisqu’elle est déposée devant un tribunal de commerce pour concurrence déloyale.