Embrouille autour des découverts
Garder sa liberté quitte à payer des taux d’intérêt ! Quand ils sont interrogés dans la rue, des habitués des découverts de fin de mois semblent accorder plus d’importance à la liberté de continuer à gérer leurs comptes comme ils l’entendent, plutôt qu’à économiser quelques intérêts bancaires mais au prix d’une intrusion dans leur vie privée et de risques de se retrouver sans liquidités. C’est du moins ce qui ressort des micros-trottoirs réalisés par des chaînes de télé alors que le débat prend de l’ampleur autour de la directive européenne sur les frais bancaires.
Banques réticentes, clients aussi…
Cette directive part d’une bonne intention : mettre fin à des pratiques bancaires souvent abusives. Quand on est dans le rouge, les banques appliquent des taux d’intérêt, comme pour un prêt. Normal. Mais environ une sur deux impose en surplus des frais fixes, généralement trimestriels, appelés « minimum forfaitaire d’intérêt » ou plus prosaïquement « frais de dossier », en grattant au passage 15, 20, 30 euros supplémentaires.
Ce sont donc ces frais fixes, la deuxième lame, que la commission européenne veut faire disparaître. Et pour cela elle entend imposer aux banques de soumettre les découverts de moins de 200 euros aux règles appliquées jusqu’à présent au dessus de 200 euros, c’est-à-dire un traitement équivalent à un prêt bancaire. Avec analyse de solvabilité du client et obligation de prévoir, dans le coût global du crédit, tous les frais éventuels. Ce qui devrait mécaniquement faire disparaître les frais fixes.
Les banques voient d’un mauvais œil ce changement qui va imposer des contraintes supplémentaires de gestion et, au passage, rogner ces frais fixes qui ne font pas souvent honneur à la profession. Mais plus surprenant, les clients habitués à être dans le rouge se montrent eux aussi réticents devant ces analyses de solvabilité qui vont se traduire forcément par un frein à leur liberté de gérer leur compte comme ils l’entendent, avec risque de se retrouver soudain sans liquidités. A cette possible intrusion dans leur vie privée et aux remarques vexatoires éventuelles, ils préfèrent majoritairement leur liberté quitte à y sacrifier une partie de leurs maigres avoirs.
La volte-face de Mélenchon
Cette double perception des choses, économie d’un côté, liberté de l’autre, va même jusqu’à l’embrouille du côté de Mélenchon et des insoumis. Voyant la tournure que prend l’affaire, LFI a lancé une pétition contre cette interdiction des découverts bancaires, actuellement en examen au conseil d’Etat, en mettant cela sur le dos des députés français. Ce qui est doublement gonflé de la part des mélenchonistes. Car la vigilance de journalistes (a priori, ceux de TF1 furent les premiers) a permis de découvrir qu’à Bruxelles, les députés européens LFI ont voté en faveur de cette directive « pour la protection des consommateurs » qu’ils pourfendent aujourd’hui en voyant les réactions qu’elle suscite. Belle preuve d’opportunisme au gré des vents et de populisme au gré des humeurs.