Mais comment l’hôpital fait-il pour tenir ?

Au lieu de redire sans cesse que l’hôpital va mal, peut-être devrions-nous aussi nous poser la question inverse : comment fait-il pour tenir ? Car s’il y a bien une activité qui, depuis le tournant du siècle a dû encaisser les coups les plus durs, c’est bien le secteur hospitalier.

Avec un premier gros malaise : les 35 heures. Le bilan global n’en a jamais été vraiment tiré mais il n’y a pas de doute que c’est bien l’hôpital qui a été le plus percuté par cette mesure de réduction du temps de travail sans compensation équivalente en recrutement, pour raisons financières et de disponibilité de personnel. Sauf du côté de la direction des ressources humaines où il a fallu étoffer les effectifs pour gérer cette usine à gaz et réorganiser le fonctionnement des services ! Du jour au lendemain, 10 % d’effectif en mois, un personnel qui s’épuise pendant qu’une partie est en RTT et ainsi de suite. Et le pire était à venir.

Le pire ce fut bien sûr la déferlante du covid. Du jamais vu depuis la grippe espagnole de 1918. Pour en mesurer la portée apocalyptique, il fallait être à l’hôpital de Nantes, le week-end de Pâques 2020. Toutes les opérations suspendues, les arrivées de malades, les lits réquisitionnés pour les suivants, les chiffres dramatiques qui tombent tous les soirs, le personnel soignant obligé de changer de tenue de protection en passant d’une chambre à l’autre et, pour ajouter à la dramatisation, les arrivées d’hélicoptères débarquant des malades de la région parisienne où il n’y avait plus de place pour eux. La totale ! Les soignants ont eu beau être applaudis tous les soirs au balcon, cette pandémie a non seulement mis l’hôpital sur le flanc, mais elle a aussi entraîné une crise des vocations que les accords du Ségur de la santé,  pour revaloriser les salaires des personnels soignants, n’ont pas réussi à endiguer.

Et puis, troisième lame pour l’hôpital, l’arrivée à la retraite de la génération du papy-boom. Un mouvement diffus mais massif, comme on n’en a jamais connu, venant progressivement surcharger les hôpitaux, tant l’âge s’accompagne de soins à apporter. Depuis Chirac, la France compte trois millions de retraités supplémentaires ! Trois millions en vingt ans qui ont fait exploser le coût des soins et mis nos caisses de retraite dans la panade, sans qu’il y ait quoi que ce soit à leur reprocher. C’est le nombre qui est la cause.  Et cela va même empirer dans les années qui viennent dans un secteur hospitalier à bout dec souffle après ces trois déferlantes : 35 heures, covid, papy-boom.

Devant un tel phénomène, devant l’allongement de la durée de vie, le pays aurait dû prendre  des mesures drastiques, comme l’ont fait tous nos voisins. Non seulement reculer l’âge de la retraite mais également faire participer les retraités les plus aisés à cette explosion des dépenses de santé liées à l’âge. Au lieu de cela, voilà qu’on avance l’âge de la retraite et que, par pur populisme, une majorité de l’assemblée considère que les retraités sont une catégorie à laquelle il ne faut pas demander d’efforts supplémentaires, même aux plus aisés, alors qu’on va taxer les entreprises, donc les salariés par ricochet, tous deux déjà accablés de charges. On est chez les fous !

Partager cet article :

Privacy Preference Center