Souchon a lancé la campagne électorale 2027

Quel ramdam ! Alain Souchon a fait très fort. En déclarant que les Français « ne sont pas assez cons » pour porter le RN au pouvoir en 2027, le patriarche de la chanson française a fait la promo de son nouveau disque en se coupant d’entrée d’un tiers de son auditoire potentiel. C’est original. Mais il a surtout déclenché un tsunami de réactions dans tout le pays et sur les plateaux télé, à croire que c’est lui qui vient de lancer la campagne 2027. On se demandait quel événement médiatique allait symboliquement ouvrir les hostilités et il n’est venu ni de la droite, ni de la gauche ni du centre mais d’une personnalité de la société civile qui, en quelques mots fleuris, a posé l’enjeu : pour ou contre le RN. La position du parti de Marine Le Pen est tellement écrasante dans les sondages actuels (parfois 20 points d’écart avec le second) qu’il ne fait désormais plus aucun doute que le RN terminera très largement en tête, Marine Le Pen semblant de plus en plus encline à admettre que c’est peut-être Jordan Bardella qui portera la flambeau.

Souchon a situé l’enjeu mais il a aussi et surtout utilisé un vocabulaire déplaisant semblant sortir d’un autre âge. Le terme fut longtemps utilisé pour désigner les supporters de Jean-Marie Le Pen mais sa fille a tellement élargi la base qu’il est tout de même excessif d’attribuer le petit mot de trois lettres à un tiers des Français, même si en 2022, on a vu qu’il était effectivement applicable à certains candidats du RN, plutôt bas de plafond. Marine Le Pen l’a implicitement reconnu elle-même.

Beaucoup de commentaires ont vu également, dans le qualificatif de Souchon, une forme de mépris de classe d’autant plus perceptible qu’il a plus tard précisé « qu’il partirait en Suisse ». Il aurait pu dire au Portugal ou en Italie. Son subconscient lui a glissé « Suisse », pays seulement accessible, pour un repli, à ceux qui ont un compte en banque bien garni.

Bien loin, l’arc républicain

Maintenant la question se pose : d’autres membres du showbiz vont-ils à leur tour emboîter le pas du chanteur pour faire barrage au RN ? C’était très à la mode quand le parti de Jean-Marie Le Pen culminait à 15 %. C’est beaucoup moins jouable quand un Français sur trois se revendique, de plus en plus ouvertement, de ce parti. Et puis, il y a les réseaux sociaux. Bien des artistes ont découvert, à leur corps défendant, qu’il y a un prix à payer à sortir de son pré carré. Qu’on reçoit bien plus de coups que de bravos quand on s’aventure en terrain découvert dans les arcanes de la politique.

Reste bien sûr la solution, plus confortable, de se contenter d’apporter son soutien à un arc républicain, position nettement moins exposée que de partir seul, la fleur au fusil. Mais croit-on qu’il est possible de refaire le coup du second tour de 2022, cet arc républicain pour lequel même des gens de droite avaient voté pour des candidats de gauche ? En revendiquant la victoire, dès le soir-même, Jean Luc Mélenchon a coupé l’envie à bien des électeurs de refaire ce coup-là. Il a, de lui-même, écarté l’hypothèse d’une réédition et ses relations actuelles avec le PS en gomment d’autant plus la perspective. Alors, Souchon aurait peut-être dû compléter sa phrase : « Les Français ne seront pas assez cons pour voter pour le RN mais il faudrait être con pour croire qu’un nouvel arc républicain est possible avec Mélenchon ».

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